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Notre cerveau aussi est victime du Covid

  • Photo du rédacteur: Sophie Vanel
    Sophie Vanel
  • 7 avr. 2022
  • 4 min de lecture

C’est confirmé. Le SARS-CoV-2 endommage notre cerveau. Des chercheurs européens pensent avoir découvert comment il provoque la mort des vaisseaux sanguins cérébraux. Cette découverte inquiète car le Covid, loin d’être bénin, pourrait favoriser l’apparition de troubles neurologiques sur le long terme.


En décembre 2019, certains articles laissent entendre que des personnes sont atteintes d’une pneumonie virale d’origine inconnue en Chine. L’information passe alors inaperçue. Pourtant, dans les 2 ans qui suivent, la pandémie de covid19 bouleverse le monde : le SARS-CoV-2 provoque de graves troubles respiratoires chez l’humain. Le covid est rapidement étiqueté comme maladie pulmonaire. Mais très vite, de nombreux patients qui ont été infectés par le covid présentes des symptômes neurologiques. Certains perdent l’odorat, d’autres ont une sensation de « brouillard cérébral » : se concentrer demande un effort plus important qu’avant. Certains patients sont même victimes de crises d’épilepsie ou d’AVC.


Au fil de l’épidémie, on commence à accumuler les preuves que le cerveau serait bien infecté. Des scientifiques découvrent des génomes viraux du SARS-CoV-2 dans le cerveau de certains patients et observent des particules virales dans le sang et les cellules qui tapissent des vaisseaux sanguins cérébraux. La communauté scientifique présume alors que le covid19 atteint le cerveau via la circulation sanguine et provoque des dysfonctionnements neurologiques chez de nombreux patients. Mais les mécanismes précis de ces perturbations étaient jusque-là inconnus.


Vaisseaux fantômes


En octobre 2021, une étude publiée dans Nature Neuroscience apporte pour la première fois un élément de réponse. Des chercheurs français, allemands et espagnols montrent qu’une enzyme du SARS-CoV-2, appelée Mpro, détruit les cellules endothéliales vasculaires du cerveau. Ces cellules tapissent les vaisseaux sanguins de la barrière hémato-encéphalique (BHE) qui forme un barrage naturel permettant de transférer des nutriments essentiels au cerveau tout en le protégeant des toxines circulant dans le sang : « la barrière hématoencéphalique permet un transport sélectif entre le sang et le cerveau, toutes les molécules qui circulent dans le sang ne peuvent pas pénétrer dans le cerveau car certaines seraient dangereuses pour lui » explique Vincent Prévot, directeur de recherche Inserm à l’université de Lille et coauteur de l’étude. Si jamais cette barrière est rompue, les dégâts peuvent être considérables.


Et c’est précisément ce qui se passe lorsque le virus atteint le cerveau. La protéine virale, Mpro, « découpe », tels des ciseaux moléculaires, une protéine humaine appelée Nemo et la désactive. Or cette dernière joue un rôle indispensable dans la survie des cellules endothéliales. « Si NEMO est supprimée, elle ne joue plus son rôle de protectrice des cellules et donc elles vont mourir » précise le chercheur lillois. Des microlésions se forment alors, avec des conséquences multiples : « la disparition progressive des cellules endothéliales va d’abord provoquer une microhémorragie dans le cerveau puis, quand elles seront complètement mortes, le vaisseau entier va mourir et former ce qu’on appelle un « vaisseau fantôme » explique Vincent Prévot.


Pour parvenir à cette conclusion, les scientifiques ont comparé le cerveau de 17 patients décédés des suites d’une infection au SARS-CoV-2 avec 23 cerveaux de personnes décédées pour d’autres raisons. Ils ont observé une proportion beaucoup plus importante de ces vaisseaux fantômes dans les cerveaux infectés par le covid19. Les vestiges de ces vaisseaux empêchent le sang de circuler, certaines cellules du cerveau ne sont donc plus irriguées et vont souffrir d’un manque d’oxygène et d’énergie. « La présence de nombreux vaisseaux fantômes non fonctionnels peut provoquer une diminution du débit sanguin pouvant entrainer le décès des patients dans les cas les plus graves » précise le scientifique.


A priori, ces vaisseaux fantômes disparaissent au bout de quelques jours. C’est en tout cas le constat que fait l’étude. Les chercheurs ont étudié le cerveau de hamsters, naturellement sensibles au virus mais ne développant que des formes modérées de la maladie. Bien que des vaisseaux fantômes se forment 4 jours après l'infection, ils disparaissent au bout de 24 jours pour laisser place à de nouveaux vaisseaux fonctionnels. Le cerveau attaqué par le SARSCoV-2 aurait donc des capacités d'autoréparation. Malheureusement, la courte période durant laquelle certaines régions du cerveau ont cessé d’être irriguées pourrait avoir de lourdes conséquences.


L’épée de Damoclès


D’après les recherches de Vincent Prévot, ces quelques jours de carences pourraient augmenter le risque de développer des troubles cognitifs, neurodégénératifs, voire des démences plus tard : « Chez les patients infectés, certaines régions du cerveau ont eu à un moment des fragilités et il est possible que leur cerveau vieillisse moins bien que s’il n’avait pas été contaminé. Il y a un risque accru de développer des maladies neurodégénératives ou des pertes cognitives comme Parkinson ou Alzheimer de manière plus probable que des gens qui n’ont pas été infecté ». Et les effets du covid long ne s’arrêtent pas là. Certains neurones contrôlent la fonction de reproduction, donc la survie de l’espèce : « le covid peut infecter ces neurones et entrainer leur mort, nous sommes donc inquiets pour le futur de la fertilité de l’espèce humaine. » alarme le chercheur lillois.


Un médicament qui protège le cerveau ?


Il existerait néanmoins une piste de traitement. Le 5 novembre 2021, le laboratoire Pfizer assure avoir développé un médicament, le Paxlovid, qui inhibe la protéine virale Mpro. Il empêcherait le virus de fonctionner correctement et protègerait dans la foulée le cerveau de la mort des cellules endothéliales. « Ce serait un médicament à prendre dès qu’on sait qu’on est positif au covid, comme on prendrait un doliprane quand on a mal à la tête » rassure Vincent Prévot. Ce médicament, malgré qu’il soit toujours en phase d’essais cliniques, constitue une belle piste pour espérer prévenir les effets à long terme du SARS-CoV-2.

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